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Thèse en cours Adélaïde SIXDENIER

Thèse

Du 1 février 2022 au 2 février 2025

Création et validation d'une échelle de dépistage du Haut Potentiel Intellectuel chez l'adulte

A l’heure actuelle, dans les cabinets de consultation en neuropsychologie, les demandes de dépistage de profils de Haut Potentiel Intellectuel chez l’adulte sont de plus en plus fréquentes, en lien avec l’identification de ce type de profil chez un enfant ou dans le cadre d’une démarche de prise en charge psychologique de difficultés présentées au quotidien.
Les particularités de leur enfant et les difficultés qu’ils peuvent éventuellement rencontrer raisonnent généralement chez le parent qui entreprend à son tour cette démarche. Mais parfois, c’est au détour de la prise en charge, par la mise en évidence de particularités de fonctionnement ne relevant pas nécessairement de la personnalité du patient, que la présence éventuelle d’un profil de Haut Potentiel Intellectuel est abordée.
Actuellement, les outils de référence utilisés pour évaluer le Haut Potentiel Intellectuel résident dans les échelles d’intelligence et principalement dans l’échelle de Weschler (WISC V pour les enfants – 2016 et WAIS IV pour les adultes – 2011). Chez l’enfant, il existe des outils non validés comme l’inventaire de dépistage de la précocité de JC Terrassier, qui permettent néanmoins d’étayer cette hypothèse de fonctionnement.
Le résultat chiffré obtenu à l’échelle d’intelligence, associé à des données issues de l’entretien clinique, permet d’établir ou non la présence du dit profil avec une valeur de référence fixée à 130 ou parfois à 125 (Grégoire, 2012 ; Brasseur & Cuche, 2017 ;  Labouret, 2021). Or, les chiffres à eux seuls ne sauraient être représentatifs des spécificités de fonctionnement des personnes présentant ce profil cognitif. Ils permettent de soulever des domaines de compétences mais ne permettent pas de définir dans les détails ce qu’implique le fait de présenter un tel profil.
Il existe effectivement des caractéristiques, des facettes de fonctionnement qui sont souvent à l’origine de la demande du bilan de dépistage et qui méritent d’être évaluées de manière plus précise. Ainsi des particularités telles que la pensée en arborescence (Brasseur & Cuche, 2017, Millètre, 2018), l’hypersensibilité (Acton &Schroeder, 2001), l’hypersensorialité (Schlegel et al, 2017), le sentiment de décalage (Stalnacke & Smedler, 2011), la tendance à procrastiner (Millètre, 2018), le raisonnement intuitif (Karwowksi, 2008, Sobkow et al. 2018) … sont-elles des caractéristiques propres au Haut Potentiel Intellectuel ou des éléments qui s’insèrent dans la définition de la personnalité du sujet ?
De la même manière, les patients dont les enfants sont identifiés comme tels se sont souvent documentés sur le sujet et apportent avec eux la liste des caractéristiques dans lesquelles ils se reconnaissent et qui peuvent être à l’origine d’une souffrance : difficultés sociales, sentiment de décalage, difficulté pour gérer le flot de pensées, difficultés avec la hiérarchie, hypersensibilité émotionnelle, intolérance à l’injustice, humour décalé… qui ne sont pas nécessairement des particularités propres au Haut Potentiel Intellectuel mais qui s’y insèrent toutefois parfois.
L’objectif de cette recherche est donc de créer un outil d’évaluation qui permettrait de recenser les caractéristiques les plus couramment retrouvées chez ces populations en se basant sur les données de la littérature scientifique en effervescence sur le sujet mais également sur les particularités de fonctionnement mises en évidence par la pratique clinique. Il s’agirait donc de vérifier les hypothèses émises par la littérature scientifique telle que, par exemple, l’idée que les personnes à Haut Potentiel Intellectuel présentent, sur le plan de la personnalité, une ouverture plus importante sur le monde (Zeidner & Shani-Zinovich, 2011) ; mais également d’en tester de nouvelles, observées dans le cadre de la pratique clinique. En effet, on pourrait par exemple questionner le lien entre les difficultés de sommeil souvent rapportées par ces personnes et une tendance à la rumination. On pourrait également questionner la faible estime de soi fréquemment relevée particulièrement chez les femmes présentant ce type de profil, ou encore leur propension au perfectionnisme (Guignard et al., 2012) qui peut aller jusqu’à les empêcher d’agir. Le syndrome de l’imposteur (Clance & Imes, 1978), l’importance du système de valeur (Hay & al., 2007 ; Tirri & Nokalineim, 2007 ; Gauvrit, 2015) sont aussi observés dans le cadre de la pratique clinique et pourraient faire l’objet d’une évaluation plus approfondie.
Une fois la liste d’hypothèses dressée, celles-ci seront testées et ensuite confrontées à l’administration de la WAIS-IV ce qui permettra d’établir des corrélations entre le score de QI et les particularités de fonctionnement évoquées chez les personnes évaluées. Des personnes ayant déjà été dépistées et dont le test date d’au moins deux ans (pour éviter un effet test-retest) seront recrutées, mais également des personnes désireuses d’entamer cette démarche d’identification et enfin des sujets tout-venants qui façonneront l’échantillon contrôle.
La comparaison des résultats obtenus devrait permettre d’établir quelles caractéristiques de fonctionnement sont effectivement le plus couramment observées chez les personnes à Haut Potentiel Intellectuel et quelles particularités sont partagées avec les personnes neurotypiques.
Les objectifs sont donc doubles : il s’agit tout d’abord de mieux comprendre comment fonctionnent ces personnes par rapport à la population dite normale. Cette grille de lecture devrait permettre d’orienter la prise en charge si elle s’avère nécessaire (tout en tenant compte du biais selon lequel les personnes venant consulter présentent la plupart du temps des difficultés, qui ne sont pas nécessairement inhérentes au dit profil et qu’il serait dangereux de considérer que toutes les personnes présentant un tel profil rencontrent des difficultés générant le besoin de venir consulter).
Un tel outil d’évaluation permettrait ensuite de réaliser une pré-évaluation pour les personnes chez lesquelles on suspecterait un tel fonctionnement qui découlerait ensuite, ou non, selon le score obtenu lors de l’évaluation, sur la passation de l’échelle de Weschler. Le dépistage pourrait effectivement ne pas s’avérer pertinent si trop peu d’éléments cotaient de manière significative dans cette échelle. Les bilans psychométriques ayant un coût certain, cela pourrait limiter un investissement parfois non nécessaire menant à une déconvenue.
Le projet comprend plusieurs étapes et commence par une revue de la littérature scientifique sur le sujet pour en extraire les caractéristiques de fonctionnement qui seront évaluées dans l’étude par le biais de l’administration de questionnaires validés. Il s’agit ensuite de créer la batterie d’évaluation qui comprend les données issues de la littérature scientifique auxquelles sont ajoutées des observations issues de la pratique clinique que l’on va également valider par l’administration d’échelles cliniques (par exemple une échelle de rumination si l’on suit l’hypothèse que les Hauts Potentiels Intellectuels ont davantage tendance à ruminer que les personnes neurotypiques). La troisième étape consiste en l’administration de l’échelle et de la WAIS-IV chez une population déjà identifiée, une population présumée Haut Potentiel Intellectuel et une population contrôle recrutées au sein des cabinets et de l’unité de consultation de l’USMB en prenant le soin de contrôler plusieurs variables (sexe, NSC, présence de troubles associés de types TDA/H, TSA, humeur…) susceptibles d’interférer dans les résultats. Les résultats à l’échelle de dépistage seront comparés à ceux obtenus à la WAIS de façon à objectiver les caractéristiques effectivement associées au Haut Potentiel Intellectuel.
En parallèle, on pourrait envisager d’élargir ce projet en l’adaptant à la population infantile ou encore proposer une étude de validation de l’échelle créée par Jean Claude TERRASSIER. En effet, l’échelle créée par ce dernier est très utilisée en France mais n’a reçu aucune étude de validation de ses qualités psychométriques, ce qui limite son intérêt.
Le projet de thèse est donc la mise au point d’un outil d’évaluation mais également l’étude de ses qualités psychométriques permettant d’aider le psychologue à mieux dépister des adultes Haut Potentiel Intellectuel. Une application à l’enfant pourrait être envisagée dans un second temps.


Bibliographie :
ACTON, G. S., & SCHROEDER, D.H. (2001). Sensory discrimation as related ton general intelligence. Intelligence, 29(3), 263-27.
BRASSEUR, S., & CUCHE, C. (2017). Le haut potentiel en questions. Mardaga
CLANCE, P.R., & IMES, S. A. (1978). The imposter phenomenon in high-achieving women : Dynamicsz and therapeutic intervention. Psychotherapy : Theory, Research & Practice, 15(3), 241-247.
HAY, P.K, GROSSn M. U. M., HOEKMAN, K., & ROGERS, K.B. (2007). Prosocial reasoning and empathy in gifted children. Australasian Journal of Gifted Education, 16, (2), 5-14.
GAUVRIT, N. (2015). Les surdoués ordinaires. Paris : P.U.F
GREGOIRE, J. (2012). Les défis de l’identification des enfants à haut potentiel. ANAE, 119, 419-424.
GUIGNARD, J-H., JACQUET, A.Y, & LUBART, T. I. (2012). Perfectionnism and anxiety : a paradox in intellectual giftedness ? PloS one, 7 (7), e41043.
KARWOWSKI, M. (2008). Giftedness and intuition. Gifted and talented international, 23 (1), 115-124.
LABOURET, G. (2021) Les enjeux de la définition du haut potentiel entre pratique et théorie dans Psychologie du Haut Potentiel. De Boeck.
MILLETRE, B. (2018). Petit guide à l’usage des gens intelligents qui ne se trouvent pas très doués. Payot.
SCHLEGEL, K., WITMER, J.S, & RAMMSAYER, T.H. (2017). Intelligence and sensory sensitivity as predictors of emotion recognition ability. Journal of intelligence, 5(4), 35.
SOBKOW, A., TRACZYK, J., KAUFMAN, S.B., & NOSAL, C. (2018). The structure of intuitive abilities and their relationships with intelligence and openness to experience. Intelligence, 67, 1-10.
TIRRI, K., & NOKELAINEN, P. (2007). Comparaison of academically average and gifted students self-rated ethical sensitivity. Educationnal Research and Education, 13 (6), 587-601.
ZEIDNER, M., & SHANI-ZINOVICH, I. (2011). Do academically gifted and non gifted students differ on the Big-Five and adaptativ status ? Some recent data and conclusions ? Personnality and individual differences, 51 (5), 566-570.

Encadrants :
Martine BOUVARD martine.bouvardatuniv-smb.fr (martine[dot]bouvard[at]univ-smb[dot]fr)
Nathalie FOURNET nathalie.fournetatuniv-savoie.fr (nathalie[dot]fournet[at]univ-savoie[dot]fr) (Codirection)
Anne DENIS anne.denisatuniv-smb.fr (anne[dot]denis[at]univ-smb[dot]fr) (Codirection)

Mots clés : Echelle, dépistage, hau,t potentiel intellectuel, adulte

CNU de thèse : 16 - Psychologie et Ergonomie

Date

Du 1 février 2022 au 2 février 2025

Financements

Profession libérale

Publié le 25 août 2023

Mis à jour le 25 août 2023