Soutenance de thèse : Inès LEPROULT

La mémoire de travail (MDT) assure le maintien temporaire des informations nécessaires à la réalisation de tâches cognitives en cours. Ses capacités limitées imposent le recours à des stratégies pour lutter contre l’oubli. Parmi celles-ci, les stratégies impliquant les connaissances sémantiques pourraient jouer un rôle déterminant. L’objectif de ce travail de thèse est ainsi d’examiner l’influence de la mémoire à long terme (MLT) sémantique sur le maintien des informations en MDT verbale. Dans cette perspective, nous avons conjointement mobilisé des approches comportementale, computationnelle et neuropsychologique afin d’évaluer trois hypothèses principales : (1) même en l’absence d’instruction explicite, des manipulations du contexte expérimental (p. ex. répartition des phases de maintien ou nature d’une tâche interférente) peuvent encourager la mobilisation spontanée de stratégies sémantiques ; (2) l’influence des connaissances sémantiques ne se limite pas au maintien de l’identité des items, mais s’étend également au maintien des liens temporaires ; (3) les stratégies sémantiques constituent un facteur modulateur du déficit en MDT associé au vieillissement normal et pathologique.

Les résultats obtenus confirment le rôle central des connaissances sémantiques dans le maintien des informations en MDT et révèlent l’existence possible de deux formes d’influence. La première correspondrait à un mécanisme de maintien sémantique direct, agissant au sein de la MDT et favorisant le rappel immédiat mais sans impact sur le rappel différé. La seconde forme reposerait sur l’intervention de la MLT et soutiendrait à la fois la rétention à court et à long terme. De plus, les connaissances sémantiques semblent également influencer le maintien des liens en MDT, y compris lorsqu’ils sont dépourvus de signification. Ce bénéfice pourrait toutefois disparaître lorsque les stratégies sémantiques induisent un regroupement des informations. Enfin, nos résultats mettent en évidence le rôle essentiel et différencié des connaissances sémantiques dans l’évolution de la MDT au cours du vieillissement : les stratégies sémantiques peu coûteuses cognitivement permettraient aux personnes âgées d’atténuer le déclin des performances en MDT, tandis que les stratégies plus exigeantes ne permettraient pas une telle compensation. Les implications théoriques de l’ensemble de ces résultats sont discutées au regard des conceptualisations actuelles de la MDT.

Mots-clés : Mémoire de travail, Mémoire à long terme, Connaissances sémantiques, Stratégie de maintien, Élaboration, Rafraîchissement attentionnel, Vieillis