Soutenance de thèse : Clément GUICHET

Avec un doublement de la population de plus de 60 ans d’ici 2050, le vieillissement sain constitue un enjeu majeur de santé publique. Pourtant, la dynamique neurocognitive qui l’accompagne demeure insuffisamment caractérisée, encore trop souvent réduite à l’image d’un déclin progressif des fonctions cognitives. Les modèles actuels peinent en particulier à rendre compte de la double variabilité liée au vieillissement : celle entre les fonctions cognitives d’une part, et celle entre les individus d’autre part.

 

Face à ce constat, cette thèse propose un modèle plus complet du vieillissement neurocognitif sain visant à : (i) examiner l’interaction entre deux trajectoires cognitives opposées avec l’âge – le déclin des fonctions exécutives et l’accès plus accru à la mémoire sémantique – via la production lexicale ; (ii) identifier les corrélats anatomo-fonctionnels de cette interaction à l’aide d’une approche par réseau, dite connectomique ; (iii) ouvrir des perspectives pour une « gérontologie de précision », en conciliant un modèle prédictif basé sur une dynamique de groupe, et une approche de précision vis-à-vis de chaque individu.

 

A travers cinq études mobilisant différentes modalités d’imagerie (IRMf, IRMd, MEG) et des méthodes statistiques sophistiquées, nos résultats mettent en lumière un scénario lifespan du vieillissement sain. Au niveau cognitif, le vieillissement impacterait la flexibilité cognitive – l’intégration et l’exploitation contrôlée de l’information – entraînant notamment des difficultés de récupération sémantique dès le milieu de vie (~ 45 – 65 ans). Pour pallier ces difficultés, les individus plus âgés s’appuieraient sur le bagage de connaissances accumulées au cours de leur vie – une stratégie de compensation soutenue par des fonctions sensorimotrices de plus bas-niveau qui reflète un mode cognitif plus prédictif et économe. Au niveau cérébral, nous mettons en avant une réorganisation anatomo-fonctionnelle totale des réseaux corticaux de bas- et haut-niveau probablement régulée par un mécanisme d’homéostasie.

 

En conclusion, nos travaux apportent un nouvel éclairage théorique qui reconceptualise le vieillissement non comme un simple déclin, mais une réorganisation optimisée de notre système neurocognitif en réponse aux forces et faiblesses propres à chaque étape de la vie adulte. Nous proposons notamment des pistes concrètes pour améliorer le devenir cognitif des individus dès le milieu de vie.