SoutenanceRecherche

Soutenance de thèse de Laura MACHART

le 12 octobre 2022
Production de parole chez l’enfant sourd : bénéfices de l’exposition à la Langue française Parlée Complétée associée à l’implantation cochléaire
Bien que l'implant cochléaire améliore la perception de la parole chez les enfants atteints de déficience auditive profonde, la perception de certaines caractéristiques acoustiques peut être altérée et le développement du langage oral impacté, avec des compétences phonologiques limitées. Afin de compléter les informations phonologiques manquantes, les gestes manuels de la Langue française Parlée Complétée (LfPC) peuvent être utilisés simultanément à la parole. Plusieurs études ont montré les bénéfices de l’exposition à la LfPC sur la perception de parole et le développement phonologique en langue vocale de l’enfant déficient auditif. Toutefois, peu d’études se sont intéressées au lien entre implant cochléaire et LfPC. Ce travail de thèse propose d’étudier les bénéfices à long terme de l’exposition à la LfPC pour le développement phonologique des enfants porteurs d’implants cochléaires.  Notre hypothèse générale est que l’exposition à la LfPC améliore la perception de parole, ce qui favorise le développement des représentations phonologiques chez l’enfant porteur d’implants cochléaires. Nous faisons l’hypothèse que les compétences phonologiques développées en perception, par le biais de l’exposition à la LfPC, se transfèrent à la production de parole, ce qui donnerait lieu à une amélioration de la production des phonèmes. Cette amélioration a été mise en évidence à partir de données acoustiques (tâche de dénomination d’images) puis caractérisée à partir de données articulatoires.
Dans un premier temps, la production de parole de 14 enfants porteurs d'implants cochléaires et de 71 enfants normo-entendants, âgés de 60 à 140 mois, a été analysée à l'aide de la tâche de dénomination d'images de la batterie EULALIES, qui est conçue pour tester la précision de la production spontanée (non imitative) de phonèmes dans un contexte de mots isolés. L’analyse de ces données par des phonéticiens experts nous a permis de mettre en évidence une amélioration significative des capacités de production de parole de huit enfants porteurs d'implants cochléaires et exposés de manière intensive à la LfPC, par rapport à six enfants dont les compétences de décodage de la LfPC étaient plus faibles voire inexistantes. Comme de nombreuses études, nos résultats indiquent que l'implantation précoce facilite le développement des compétences phonologiques mais que la production de certaines caractéristiques phonétiques, tels que les contrastes de voisement et nasalité ainsi que le mode et le lieu d'articulation, restent dégradés même chez les enfants bénéficiant d’une implantation précoce. Par ailleurs, nos analyses mettent en évidence que l’exposition à la LfPC réduit considérablement le nombre d'erreurs sur ces caractéristiques phonétiques : nos données soulignent qu'une exposition adéquate à la LfPC semble améliorer la production du voisement, du contraste de nasalité ainsi que du mode et du lieu d’articulation.
 
Dans un second temps, les productions acoustiques ainsi que les gestes articulatoires, recueillis par échographie linguale, de neuf enfants porteurs d’implants cochléaires et exposés à la LfPC et de dix enfants normo-entendants, âgés de 51 à 137 mois, ont été étudiées. Les résultats suggèrent que l’exposition à la LfPC permet aux enfants porteurs d’implants cochléaires de produire les gestes articulatoires linguaux de la même façon que leurs pairs normo-entendants.
 
Comme l'ont soutenu plusieurs équipes de recherche, l’exposition à la LfPC est fonctionnellement bénéfique pendant la communication puisqu’elle fournit un accès visuel à tous les phonèmes du français. De plus, les résultats de ces deux études mettent en avant ses effets à plus long terme sur la production de parole, probablement expliqués par le fait qu'un meilleur accès perceptif fournit de meilleures représentations phonologiques.
 
Ce travail de thèse fournit également deux corpus de données de référence sur la production de parole d’enfants au développement typique et d’enfants porteurs d’implants cochléaires : un ensemble de données phonétiques ainsi qu’un ensemble de données acoustiques et articulatoires. Ces données peuvent informer la pratique clinique en fournissant des pistes d’intervention orthophonique pour faciliter la prise en charge de l’enfant porteur d’implants cochléaires mais également favoriser les interactions quotidiennes à domicile en confirmant le rôle crucial des repères visuels pour un développement optimal de la production et du traitement de la parole.
 
Jury :
Madame Hélène LŒVENBRUCK
Directrice de recherche, CNRS, Directrice de thèse
Madame Anne VILAIN
Maîtresse de conférence, Université Grenoble Alpes, Co-encadrante de thèse 
Madame Cécile COLIN
Professeure des universités, Université Libre de Bruxelles, Rapportrice
Madame Marija TABAIN
Professeure des universités, La Trobe University, Rapportrice
Madame Jacqueline LEYBAERT
Professeure émérite, Université Libre de Bruxelles, Examinatrice
Monsieur Pascal PERRIER
Professeur des universités, Université Grenoble Alpes, Examinateur
Monsieur Jean-Luc SCHWARTZ
Directeur de recherche, CNRS, Président et examinateur
Monsieur Michel FRANCOIS
Membre du Collège des représentants des associations de personnes en situation de handicap ou leurs familles au Conseil national consultatif des personnes handicapées, Invité
Monsieur Richard NOMBALLAIS
Enseignant spécialisé, INJS de Chambéry, Invité

Localisation

Saint-Martin-d'Hères - Domaine universitaire
salle Jacques Cartier, Maison des Langues et des Cultures, 1141 avenue Centrale, sur le domaine universitaire de St Martin d'Hères 
à 9h - l'accessibiliré en LfPC sera assurée par 2 codeuses
Mis à jour le 16 novembre 2022